Réforme de la gouvernance locale: beaucoup de questions en suspens pour Saint-Jean

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Jonathan Poirier

Éditeur/Rédacteur en chef
jonathan.poirier@arcf.ca

Le 18 novembre dernier, le ministre des Gouvernements locaux et de la Réforme de la gouvernance locale, Daniel Allain, a dévoilé sa tant attendue réforme municipale. Même si elle est généralement bien accueillie dans la province, elle suscite de nombreuses questions de la part de la Ville de Saint-Jean. Il aura fallu attendre jusqu’au 30 novembre pour savoir sa réaction.

Faisant passer le nombre d’entités municipales de 340 à 90, il s’agit de la plus grande réforme municipale depuis le programme Chances égales pour tous du gouvernement Robichaud en 1965. Cette réduction transforme surtout les 236 districts de services locaux en 12 districts ruraux. Ils seront désormais gérés par des gouvernements locaux.

Pour la région de Fundy, Saint-Jean, Quispamsis et Rothesay demeurent inchangés au niveau de leurs territoires. Pour Donna Reardon, mairesse de Saint-Jean, la ville est déjà assez grande:

«Est-ce que nous voulons plus de territoire? Je ne le sais pas. Quand tu intègres la population d’un territoire à ta ville, tu obtiens aussi ses infrastructures à gérer».

Un défi qui peut être de taille pour une entité municipale qui a déjà 315,96km2 de territoire à entretenir en matière de routes, d’égouts, de barrages, de stations de pompage, etc.

À lire : Ville ou banlieue? Saint-Jean victime des choix individuels

Une réforme aux frais des villes?

Dans sa lettre Réforme de la gouvernance locale – Réponse initiale de Saint John au livre blanc, la Ville félicite d’abord le gouvernement provincial pour la publication de son livre blanc, puisqu’elle reconnait l’ampleur du travail qui a été fait. Cependant, elle affirme être préoccupée par le financement de la réforme dont bénéficiera le milieu rural:

«[…] nous estimons que la restructuration ne devrait pas entraîner de réductions importantes des subventions accordées aux municipalités existantes. […] De plus, les villes ne devraient assumer aucun fardeau financier découlant de la création de nouvelles structures de gouvernance rurale».

Ces préoccupations proviennent en particulier du financement que reçoivent les villes. La réforme de la gouvernance locale pourrait affecter deux sources: la formule de subvention de financement et de péréquation communautaires et le Fonds pour le développement des collectivités du Canada (fonds provenant de la taxe sur l’essence). Selon la mairesse Reardon, aucune information n’a été communiquée au sujet des changements potentiels à ces formes de financement, ce qui amène de l’incertitude pour la ville.

Une réforme globale de l’impôt foncier qui se fait attendre

Le plus gros point de friction entre la réforme du ministre Allain et la Ville de Saint-Jean demeure au niveau de la mise à jour du système d’impôt foncier. Pour redresser la situation financière précaire de la ville, le document Soutenir Saint John – Un plan en trois parties a été réalisé en partenariat avec la province en août 2019. Dans ce plan, l’un des éléments assurant la pérennité de la ville est l’engagement du gouvernement provincial de réformer l’impôt foncier d’ici 2022. Cependant, dans le livre blanc sorti récemment, on apprend que le gouvernement a l’intention d’aller de l’avant dans trois ans. Une décision qui déçoit la mairesse Reardon en raison des efforts de la ville:

«Nous avons appliqué toutes les recommandations de ce document produit conjointement avec la province. Nous avons réussi à réduire nos dépenses de 10 millions de dollars. Plusieurs de nos employés ont accepté de geler leurs salaires pour y arriver, mais toutes ces actions étaient basées sur la promesse de réformer l’impôt foncier d’ici 2022. Il faut que cette partie de la réforme soit accélérée».

Dans sa forme actuelle, le système d’impôt foncier fait perdre de l’argent à la ville portuaire. Comme le rapportait CBC en juin 2020, il y avait une différence de 47,7 millions de dollars en évaluation foncière entre le Centre communautaire Samuel-de-Champlain de Saint-Jean et le Centre communautaire Sainte-Anne de Fredericton. Une telle différence de valeur affecte la somme que la province doit payer en impôts fonciers à chaque ville. En 2020, CBC rapporte que pour ces deux centres similaires, Fredericton a reçu 1 million de dollars en taxes de plus. Selon madame Reardon, la nouvelle formule de taxation doit être compréhensible, plus concrète et différentiant bien les catégories de propriétés. Elle serait actuellement trop subjective.

La mairesse ajoute le modèle désuet de taxation désavantage pas seulement sa ville, mais aussi la province dans son développement économique:

«Le Nouveau-Brunswick est un endroit stratégique pour avoir une bonne part du marché, en particulier grâce à notre port. Cependant, nous avons perdu de gros joueurs qui sont partis en Ontario à cause des taux de taxes. Il faut s’aligner avec le reste du pays pour être un compétiteur de taille. Pour ça, il faut réformer nos modèles de taxations pour être attrayants pour les entreprises. Nous avons déjà tous les autres éléments pour réussir.»

L’entrevue avec la mairesse Donna Reardon a été réalisée en anglais et ses réponses ont été traduites.

À lire: Le Conseil municipal de Saint-Jean dévoile ses priorités

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